Kee Profit mat eiser Gesondheet!

Le ministère de la Santé et de la Sécurité sociale a annoncé récemment son intention d’ouvrir complètement les soins ambulatoires au secteur extrahospitalier et de créer un cadre légal pour les « sociétés de médecins ».

Sous couvert d’« efficacité » et de « modernisation », cette réforme marque en réalité un tournant dangereux : l’ouverture du système de santé luxembourgeois à la logique du profit.

Derrière le langage technocratique se cache une réalité limpide : des structures purement privées à but lucratif pourront prochainement prester et facturer des actes médicaux jusqu’alors réservés au milieu hospitalier.

C’est une décision politique lourde de conséquences, qui aligne le gouvernement sur les revendications de l’AMMD, poussées par le déconventionnement lancées fin octobre 2025, et ouvre la porte à une marchandisation progressive de la santé.

Plutôt que de défendre l’intérêt général et de mettre en place une vraie stratégie par rapport aux besoins sanitaires de la population, le gouvernement semble tout simplement céder au lobby médical

Sous prétexte de vouloir « moderniser » le système, le gouvernement cherche surtout à créer un marché de la santé, où la rentabilité prime sur la solidarité, et où le patient devient un client-payeur.

L’Union des syndicats OGBL-LCGB s’y oppose catégoriquement !

Notre système repose sur un principe fondamental : chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Or, ce principe est incompatible avec la création de sociétés de médecins visant à dégager des profits sur des prestations financées collectivement, ou bien avec le déconventionnement des médecins et leur droit à l’autotarification revendiquée par l’AMMD.

Derrière cette réforme gouvernementale et ces revendications de l’AMMD se profile le risque d’une médecine à deux vitesses : des structures privées se concentreront sur les actes les plus rentables pour lesquels ils pourront demander le tarif qui leur semble bon, tandis que les soins lourds, chroniques ou moins rémunérateurs seront laissés aux hôpitaux publics.

Face à ce système, un financement durable de notre assurance maladie-maternité, basé sur la solidarité tout en garantissant des remboursements identiques aux assurés, ne pourra plus être garanti puisque le profit va désormais primer sur les besoins des assurés. Beaucoup d’assurés ne disposent pas des moyens financiers pour conclure une assurance privée qui offre une protection de santé comparable à celle de la CNS et risqueront donc de ne plus se faire traiter ou devront se contenter de soins de santé de moindre qualité. La santé deviendra ainsi un bien de luxe.

Un danger supplémentaire se profile pour les professionnels de santé : en effet, la ministre de la Santé et de la Sécurité sociale a d’ores et déjà confirmé que les salariés de ces structures médicales privées ne seraient pas couverts par la convention collective FHL, qui assure aujourd’hui les conditions de travail et de rémunération du personnel des hôpitaux publics et de leurs antennes. Après les attaques sans précédent contre les conventions collectives et les droits syndicaux en la matière, le gouvernement en remet une couche et s’attaque directement à l’une des conventions collectives les plus importantes et les plus fortes au Luxembourg. Il remet en cause son engagement ferme de ne plus s’attaquer aux conventions collectives, et ce de manière déguisée. Il s’attaque aussi directement aux conditions de travail et de rémunération des quelque 10.000 salariés couverts par la convention FHL, qui risquent de voir leur convention collective affaiblie par ces projets.

Plutôt que d’investir dans le système de santé public — qui est confronté à un manque de main-d’œuvre grandissant et à une détresse du personnel toujours plus importante — la ministre de la Santé et de la Sécurité sociale compte attiser les appétits d’investisseurs privés non issus du monde médical.

Après avoir tenté d’attaquer et d’affaiblir notre système de pensions public et solidaire, le gouvernement Frieden veut désormais la peau de notre système de santé public et solidaire.

L’Union des syndicats OGBL-LCGB exige du gouvernement qu’il :

  • abandonne tout projet permettant la création de sociétés de médecins à but lucratif pouvant prester les actes médicaux actuellement réservés au secteur hospitalier ;
  • mette en place une définition cohérente de la médecine ambulatoire et développe une stratégie nationale de prise en charge ambulatoire ;
  • limite l’exploitation des antennes ambulatoires décentralisées aux établissements hospitaliers, en garantissant ainsi l’application de la CCT FHL aux salariés occupés dans les structures ambulantes ;
  • garantisse le maintien du conventionnement obligatoire et mette en place un contrôle public strict du respect des tarifs ;
  • renforce le secteur extrahospitalier sans le mettre en concurrence commerciale avec le secteur hospitalier ;
  • assure la couverture conventionnelle FHL à tout le personnel exerçant dans des structures médicales reconnues par la CNS.

Le Luxembourg n’a pas besoin d’une médecine de luxe réservée à quelques-uns, mais d’un système de santé solidaire, universel et équitable, au service de toutes et tous.

L’Union des syndicats OGBL-LCGB n’hésitera pas à utiliser tous les moyens à sa disposition pour défendre le caractère public, social et solidaire du système de santé au Luxembourg ainsi que les conditions de travail du personnel y travaillant.

Communiqué par l’Union des syndicats OGBL-LCGB, le 11 novembre 2025