Nouveau projet de loi relatif aux allocations familiales : Il faudra encore un effort pour se conformer au droit européen

Le 14 avril 2020, la Caisse pour l’avenir des enfants (CAE) a annoncé avoir procédé à une «première analyse» de l’arrêt de la CJUE du 2 avril 2020 condamnant l’actuelle législation luxembourgeoise relative aux allocations familiales pour discrimination envers les salariés frontaliers. La CAE a ainsi dû «constater qu’une adaptation législative des conditions d’octroi pour l’allocation familiale est inévitable» et que les juges européens ont estimé que le travailleur frontalier doit «contribuer aux charges d’entretien» des enfants pour lesquels il demande l’octroi de prestations familiales.

Partant de là, la CAE a procédé à une nouvelle analyse des dossiers «beaux-enfants» en exigeant désormais la preuve que le demandeur frontalier pourvoit à l’entretien de l’enfant du conjoint sur base de l’appréciation de 3 éléments:

  • l’activité professionnelle des parents biologiques
  • les modalités de garde
  • le versement ou non d’une pension alimentaire

Sur cette base, la CAE refuse désormais d’accorder le bénéfice des allocations familiales aux beaux-parents lorsqu’elle considère que les parents biologiques assurent eux-mêmes l’entretien de leur enfant, si les éléments suivants sont réunis:

  • autorité parentale conjointe
  • droit de visite et d’hébergement secondaire du père
  • activités professionnelles des parents biologiques en Belgique
  • paiement d’une pension alimentaire de 75 euros

L’OGBL estime que la CAE procède à une lecture erronée de l’arrêt de la CJUE du 2 avril 2020, alors que la Cour de Luxembourg a retenu que le droit européen prévoit que:

  • la condition de la contribution à l’entretien de l’enfant peut être démontrée par des éléments objectifs comme le mariage/partenariat ou un domicile commun, sans qu’il soit nécessaire de spécifier les modalités du soutien ni d’en chiffrer l’ampleur
  • la prise en charge de l’enfant est présumée jusqu’à l’âge de 21 ans

En d’autres termes, plutôt que de se perdre dans une spécieuse comptabilité des dépenses familiales, la CAE devrait considérer qu’à partir du moment où des circonstances objectives, telles que le mariage/partenariat et/ou un domicile commun, sont données, la demande d’allocations familiales d’un salarié frontalier doit être accordée.

Au vu de ce qui précède, l’OGBL ne peut que constater que les décisions de la CAE, malgré ses déclarations de principe, sont toujours contraires à ce que prévoit le droit européen en la matière et qu’on ne peut donc que légitimement douter de la compatibilité du récent projet de loi de la ministre de la Famille — qui se base toujours sur le principe du lien de filiation — avec les exigences européennes de non-discrimination.

Communiqué par l’OGBL
le 1er juillet 2021