La nouvelle Commission européenne a dévoilé le Pacte vert européen («Green deal»), sa nouvelle stratégie de croissance pour l’Europe. Avec un programme législatif couvrant l’approvisionnement en énergie, la production industrielle, les transports et l’agriculture, l’Europe ambitionne de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 50 à 55% d’ici 2030 et d’atteindre la neutralité climatique à l’horizon 2050.
L’OGBL salue cette initiative et soutient les objectifs visés, tout comme la mutation prévue de la Banque européenne d’investissement en «banque du climat» et le programme d’investissement européen en faveur de la protection du climat. Toutefois, la question se pose de savoir si ce Pacte vert, tel qu’il se présente, suffira pour atteindre les objectifs visés. En effet, seuls 7,2 milliards d’euros supplémentaires, sur un montant total de 100 milliards d’euros, sont prévus pour mettre en œuvre cette «transition juste» (cf. article d’Adrien Thomas dans ce dossier). Dans l’ensemble, le Pacte vert reste bien inférieur aux calculs des dépenses nécessaires pour atteindre l’objectif de zéro émission nette en 2050 effectués par les Nations Unies, l’OCDE ou la Cour des comptes européenne.
Dans ce contexte, l’OGBL rappelle que les mécanismes du Pacte de stabilité et de croissance européen, qui déterminent les valeurs de référence de la politique budgétaire des États membres de la zone euro, doivent être réformés pour donner aux États une plus grande marge de manœuvre pour les investissements futurs. Sur ce point, il demande que les investissements nécessaires à la transition écologique ne soient pas comptabilisés comme dette dans le cadre des critères de Maastricht. Cette revendication s’adresse aussi directement au gouvernement luxembourgeois afin que celui-ci agisse instamment au niveau européen dans cette direction.
Pour l’OGBL, le Pacte vert doit revêtir une dimension sociale forte. Il ne suffit pas de parler de la «transition juste», il faut en faire une composante équivalente de toutes les initiatives et tous les règlements à l’échelle européenne. Les travailleurs européens ne doivent pas être sacrifiés sur l’autel de la transition numérique et écologique. Le socle européen des droits sociaux doit être mis en œuvre, la protection des emplois et des qualifications doit être une priorité et la participation des syndicats doit être étendue à tous les niveaux. Cette dimension n’est pas suffisamment prise en compte dans le Pacte vert tel qu’il se présente actuellement. On peut craindre que les investissements du futur «fonds de transition juste» ne bénéficient plus aux employeurs qu’aux travailleurs.
Au demeurant, il revient aux États membres de décider ou non de mettre en place un plan pour la transition juste. Seuls les États qui le feront recevront des financements. Par conséquent, la transition juste risque de rester à l’état de théorie dans une grande partie de l’Europe. La mise en place d‘un tel plan devrait être obligatoire pour tous les États membres. Les partenaires sociaux doivent y participer, et leur rôle au niveau européen ne doit pas non plus être négligé.
Le Pacte vert ne doit, en aucun cas, entraîner l’aggravation des inégalités sociales en Europe. S’agissant de la politique fiscale, notamment de l’augmentation des moyens fiscaux pour la politique climatique, les bas et moyens revenus ne doivent pas être frappés par des charges fiscales supplémentaires. Il faut taxer, comme on le demande depuis longtemps, les grandes fortunes et les revenus du capital. Les systèmes sociaux des États doivent être renforcés, et non affaiblis. Le même principe s’applique aux services publics.
Quand on parle du Pacte vert, il faut savoir que la justice sociale est le principal moteur de la transition écologique et numérique. Elle permet de lutter contre les nouvelles fractures sociales et garantit une bonne qualité de vie pour tous. Elle est ce qui motive et mobilise la société pour atteindre les objectifs climatiques. L’OGBL y apportera sa contribution.