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L’annonce de la taxe sur le CO2 a échauffé les esprits

Les esprits s‘étaient apaisés depuis que les syndicats avaient contre­carré la tentative de Jean-Claude Juncker, dans le cadre de sa dernière tripartite peu glorieuse, de manipuler à nouveau l‘index au détriment du pouvoir d‘achat, en retirant les produits pétroliers du panier moyen.

Le directeur de la Fédération des industriels luxembourgeois (FEDIL) vient de jeter un pavé dans la mare dans l’éditorial de son journal. Lui aussi souhaite alléger le panier moyen: seuls des «produits durables» devraient s’y trouver.

Le maintien d’un système d’indexation qui continuerait à prendre en compte l’évolution des prix des combustibles fossiles et d’autres biens et services nuisibles à l’environnement ne serait plus compatible avec les revendications climatiques du gouvernement. Si une taxe sur le CO2, entre autres, devait être incluse dans le calcul de l’index, cela se traduirait par un pouvoir d’achat qui «justifierait et récompenserait les comportements indésirables des consommateurs».

Il n’est guère surprenant qu’une organisation patronale cherche une fois de plus à dévaloriser l’index aux dépens des consommateurs, dans une perspective purement actionnariale. L’UEL rejette à ce jour le rétablissement du de fonctionnement normal du système d’indexation décidé par le gouvernement en 2014.

Mais ce qui est particulièrement inquiétant, c’est que l’industrie se présente en même temps comme l’apôtre d’une société respectueuse du climat. Tout d’un coup, le monde patronal remet en question la liberté inviolable de l’acteur du marché dans une économie libéralisée, qu’il a pourtant toujours défendue. Une telle manipulation de l’index implique que le consommateur devrait être éduqué pour devenir un «consommateur durable» !

Si l’on avait réellement eu affaire à un changement de paradigme du monde patronal en ce qui concerne les questions environnementales, le directeur de la FEDIL se serait abstenu d’appliquer le principe du pollueur-payeur aux consommateurs.

Il aurait plutôt lancé un appel aux capitaux industriels pour qu’ils cessent de mettre sur le marché des produits nocifs pour l’environnement. Il aurait incité leurs lobbyistes à Bruxelles et ailleurs à militer en faveur d’une réforme du négoce de droits d’émission plus respectueuse de l’environnement. Il aurait critiqué les grands producteurs de combustibles fossiles qui ne se lassent pas d’entraver la lutte pour le climat afin de préserver leur source de profit. Et il aurait proposé d’augmenter la charge fiscale des entreprises là où une production plus respectueuse de l’environnement est possible, mais non mise en œuvre. Au lieu de cela, c’est tout l’inverse qu’il préconise: une redistribution du bas vers le haut en réduisant les coûts salariaux et les revenus de retraite.

L’OGBL rejette catégoriquement
la proposition du directeur de la FEDIL

Il est bon de rappeler que l’index ne constitue rien d’autre qu’un mécanisme compensatoire pour le maintien du pouvoir d’achat réel. L’index ajuste le pouvoir d’achat à l’évolution des prix et compense la perte de pouvoir d’achat réel en découlant, dans les deux cas avec un décalage. Ni plus, ni moins.

Il n’est donc ni une mesure de politique sociale, ni une mesure de redistribution de la richesse créée par l’économie, ni un instrument de politique environnementale visant à «rééduquer» les consommateurs pour qu’ils se tournent vers des produits plus durables.

À l’heure actuelle, la majorité des ménages ne peut tout simplement pas se passer des produits pétroliers.

Une telle manipulation de l’index reviendrait à supprimer une des composantes essentielles du panier moyen (les produits pétroliers) et à mettre en péril la protection du pouvoir d’achat. En outre, elle affecterait principalement les ménages à faible revenu, dès lors que la part de ces produits dans leur budget total est beaucoup plus importante que pour les autres catégories de revenus.

La demande en faveur d’une désindexation des biens et services non durables, c’est-à-dire nuisibles à l’environnement, est encore plus absurde si l’on considère d’autres exemples. Les produits à base de viande doivent-ils eux aussi être retirés du panier moyen en raison des émissions élevées de méthane? Doit-on également faire une croix sur les dépenses de voyage? Quid des communications électroniques? Un e-mail avec pièce jointe consomme autant d’énergie qu’une lampe à économie d’énergie en une heure. L’envoi de 10 milliards d’e-mails par heure dans le monde représente une consommation énergétique équivalente à la production horaire de 15 centrales nucléaires.

Dans son accord de coalition, le gouvernement s’est engagé à ne pas manipuler l’index. Tout comme les accises, la taxe annoncée sur le CO2 doit faire partie intégrante du panier moyen.

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